Je m’appelle Charles j’ai 11 ans et je vais rentrer cette année en quatrième. J’irai en pension dans un collège spécialisé pour EIP, par la force des choses, c’est la seule solution, car dans mon ex-collège privé de Fontenay le Comte, j’ai été rejeté par l’ensemble des élèves de ma classe. Le laxisme des enseignants et surtout du directeur a fait que j’ai dû être déscolarisé, avant la fin de l’année scolaire par mesure de sécurité, tellement les choses devenaient graves. Les profs sont ignorants de nos problèmes, ils ne m’ont pas aidé, bien au contraire.
Je voudrai apporter mon témoignage d’enfant précoce heureux, sans problèmes. Jusqu’à cette année, tout se passait en douceur et se déroulait normalement.
Mais hélas les années se suivent et ne se ressemblent pas, cela tient à peu de choses, et très souvent au bon vouloir des enseignants.
Parfois je me demande, si le fait d’être surdoué est un avantage ou un inconvénient. Pour que cela soit vraiment un avantage, il faudrait que les enseignants qui sont censés nous aider, nous diriger, fassent au moins l’effort de nous comprendre.
Ma vie d’enfant précoce, n’était en rien différente de celle des autres enfants, j’avais la même école et le même collège, les mêmes jeux et les mêmes activités. Je ne me considère pas différent, je suis comme les autres enfants avec mes qualités et mes défauts. Je sais que beaucoup de gens pensent que les enfants précoces sont des enfants difficiles à vivre, peu communicatifs, orgueilleux, prétentieux, imbus de leur personne. Ceci est dû en partie aux médias qui donnent souvent une fausse image de ces enfants en les montrant comme des curiosités. Ceux que je connais, ne ressemblent pas du tout à cela, ce sont des enfants gentils, polis, serviables, sérieux, respectueux, équilibrés et attachants.
Revenons à mes débuts. La précocité ! Mes parents étaient très bien au courant de cela, ils pensaient comme beaucoup de parents que ces choses là n’arrivaient que chez les autres et ils se croyaient à l’abri de tous ces problèmes.
Je sais que je suis EIP depuis l’âge de cinq ans et trois mois. Je me suis habitué à cet état depuis longtemps et nous n’en parlons plus, il faut vivre avec, normalement, simplement. Bien sûr, j’ai eu beaucoup de chance d’être découvert très tôt et c’est pour cela que c’est relativement plus facile pour moi que pour les adolescents découverts tardivement.
C’est ma maîtresse de Grande Section qui m’a découvert, elle a tout déclenché, quelques semaines après la rentrée. Elle a appelé Maman pour lui dire que je ne pouvais pas rester dans cette classe. Que j’étais trop en avance, que je savais déjà lire des mots, que je perturbais la classe, car je savais déjà ce qu’elle expliquait et de plus j’en profitais pour faire le pitre (car déjà je m’ennuyais) Elle a ajouté qu’elle allait en parler au conseil de classe pour me faire sauter une classe.
A partir de là, les choses se sont enchaînées rapidement, tests chez le psychologue, passage en C.P. Je me demandais ce qui m’arrivait, et mes parents pensaient que c’était le ciel qui leur tombait sur la tête.
Je me suis bien intégré dans cette nouvelle classe et j’ai dû travailler pour rattraper les élèves de C.P. qui avaient quelques semaines d’avance sur moi. Tout s’est bien passé, à Noël, je savais déjà lire couramment.
A la rentrée suivante, j’ai fait CE1 et j’ai commencé à m’ennuyer. La maîtresse me faisait étudier le CE2 en aparté, ce qui m’a permis de passer directement en CM1 l’année suivante.
J’étais avec des grands de 9 à 10 ans, j’étais le plus petit de la classe, mais j’étais toujours dans les sept ou huit premiers, et j’avais de bonnes moyennes. Le CM2 a suivi sans problème, puis la sixième au collège Saint Charles à Saint Brieuc et jusque là tout s’est merveilleusement bien passé, j’étais parfaitement intégré dans ma classe, j’avais de bonnes relations avec tout le monde, le collège, les profs et les élèves étaient vraiment super.
Nous avons dû déménager à Fontenay le Comte en Vendée pour le travail de papa. C’est ici que les choses vont commencer à se détériorer pour moi. Je suis rentré en cinquième
( avec deux ans d’avance ) dans un collège privé et là, les choses se sont très mal passées. J’ai été mis volontairement dans une classe de redoublants, pourquoi, c’est un mystère ? Seul le directeur pourrait répondre, pourtant mes parents lui avaient demandé un rendez-vous avant la rentrée et lui avait expliqué ma situation. ( Un tiers de redoublants dans la classe, c’est beaucoup ) Une classe à problèmes d’après les enseignants eux-mêmes. Ces élèves de deux à quatre ans plus âgés que moi, ne m’ont pas accepté, et m’ont fait toutes les misères possibles, et inimaginables, encouragés par le laxisme des enseignants qui n’ont rien fait pour arrêter cet état de faits, malgré toutes nos protestations par téléphone et par lettres recommandées. Aucune punition n’a été donnée, aucune sanction n’a été prise. Il aurait suffi qu’un directeur digne de ce nom, lève le petit doigt pour faire cesser cette maltraitance, mais rien n’a été fait.
Comme la plupart des élèves de cette classe ne voulaient pas travailler et ne me supportaient pas, car disaient-ils, j’étais trop petit, trop jeune, trop gamin, ils ont commencé par m’insulter, puis ils m’ont agressé physiquement pendant les cours, puis frappé et jeté à terre dans le couloir, étranglé en cours de sport en présence du prof, giflé en classe, si fort que ma tête est allée frapper le mur de la classe, l’élève responsable de classe m’a jeté par quatre fois ses ciseaux dans le dos et la prof à refusé d’intervenir, encore en sport, ils ont roulé mon pantalon dans la laine de verre, une autre fois ils ont caché mon pantalon, j’ai même été enfermé dans le CDI, pendant l’heure de midi, alors qu’on m’avait envoyé pour faire des photocopies etc. etc.
Voyant que tout ce que faisaient mes parents ne servait à rien, appels téléphoniques, lettres recommandées, réunions, etc. Je ne disais plus rien, supportant tout, de peur d’être de nouveau confronté à mes agresseurs. Mais maman s’est rendu compte au mois de mai, que je recevais des coups de stylos à plume dans le dos pendant les cours. Elle m’a conduit chez un docteur, qui a constaté les faits. Celui-ci a écrit une lettre au directeur le mettant en demeure de faire cesser immédiatement ces maltraitances dans son établissement.
Mes parents en ont profité pour me déscolariser immédiatement sans préavis, par mesure de sécurité, sachant avec certitude que rien ne serait fait, qu’aucune décision ne serait prise. A ce jour comme les fois précédentes d’ailleurs, nous attendons toujours la réponse du directeur. De plus, mon absence d’un mois est passée totalement inaperçue, aucun appel téléphonique, aucune lettre du collège. Nous avons seulement su, que le directeur avait téléphoné au docteur pour tenter de minimiser l’affaire.
Voilà ou j’en suis, privé d’école parce que des gens ne font pas ce qu’ils devraient faire. S’ils avaient réagi énergiquement, ces maltraitances auraient été arrêtées immédiatement et définitivement, pourtant nous n’avons pas manqué de les signaler.
Nous avons remarqué un fait curieux lors des réunions de parents d’élèves, les professeurs ignoraient totalement que le docteur et nous, avions envoyé des lettres recommandées au directeur de l’établissement.
Parfois je me demande, si les enfants ont vraiment des droits, les mêmes droits que les adultes, n’y a t’il pas, non-assistance à enfant en danger dans mon cas ?
Je souhaite à tous les petits surdoués, de ne pas avoir à subir de tels agissements. Si vous êtes confrontés à ce genre de problèmes, n’hésitez surtout pas à en parler à vos parents et à votre entourage, c’est très important.
Cette maltraitance peut revêtir diverses formes. Elle peut être sournoise, cachée, non dit, elle peut se référer à des faits non punissables par la loi, mais très dévastateurs surtout chez les jeunes enfants précoces, comme les humiliations, les moqueries, le chantage, les menaces voilées, la ségrégation, etc. (voici par exemple le devoir qu’a eu à faire mon frère en CM1 : Faites la liste des enfants que vous n’aimeriez pas voir dans votre classe à la rentrée prochaine, ce genre de ségrégation est intolérable ) et bien sûr, si de plus, elle est encouragée par le laxisme.
Maintenant je sais, ce que c’est que d’être rejeté et maltraité sans raisons par les autres, je sais aussi ce que c’est d‘appeler au secours et de ne pas avoir de réponse, moi qui n’avais jamais eu le moindre problème jusqu’à cette année. Maintenant, je comprends tous ceux qui vivent mal leur précocité, qui ont des difficultés pour s’intégrer, qui sont en échec scolaire, qui font des tentatives de suicide. A t’on le droit d’empêcher un enfant, qu’il soit roux, brun, blond d’aller avec tous à l’école ? L’enfant n’a pas choisi, ni sa couleur de cheveux, ni sa couleur de peau, ni d’être plus ou moins intelligent que les autres : ce sont les hasards de la génétique. Sa place dans notre société existe, les parents, les enseignants, les responsables devrons l’aider à trouver sa place dans la société et l’aider à faire valoir son bon droit.
Les enfants précoces, qui sont rejetés, qui n’ont pu s’intégrer comme moi, ont une souffrance morale permanente, une angoisse, une peur qui souvent est invisible, car ils cachent leurs difficultés à leur entourage. Mais elle se ressent très fortement surtout à la maison dans ses comportements avec ses proches, ses parents, ses frères et ses sœurs. Ils deviennent insupportables, coléreux, difficiles à vivre, solitaires, repliés sur eux-mêmes ce qui n’arrange rien. Les parents doivent être très attentifs et se poser des questions dès qu’il y a changement de comportement.
A la rentrée prochaine je vais rentrer en quatrième dans un collège spécialisé pour EIP, je suis vraiment très heureux de cette décision, c’est un réel soulagement, je recommence à vivre. J’aurai des professeurs spécialement formés pour nous les EIP, et je serai avec des enfants comme moi, qui me comprendront, donc je n’aurai plus à redouter ces graves problèmes de maltraitance.
Je souhaite sincèrement à tous les EIP de rencontrer des enseignants compréhensifs et ouverts comme ceux qui m’ont accompagné du primaire à la sixième, d’avoir comme moi l’appui et les encouragements de toute leur famille, pour les aider dans les moments difficiles qu’ils peuvent traverser.
Charles
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