Témoignage d’adulte : oui c’est injuste

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Oui c’est injuste !


Oui, c’est injuste de passer son enfance a recevoir comme seul compliment « manque d’attention », « a les capacités mais peut mieux faire », « trop distrait »
Oui c’est encore plus injuste de vivre des années en souffrance avec ses parents. C’est horrible d’être passif devant notre propre capacité à décevoir, a ramener au néant les rêves d’avenir qu’ils font pour nous.
Ne jamais pouvoir répondre au « Quand vas-tu arrêter de rêver ? » ; s’entendre souvent dire « Tu étais si intelligent petit », »je suis tellement déçu »…

Et pourtant, je comprends. Tout. Vite. Et heureusement car si je ne comprenais pas vite, je ne pourrai pas faire vite et ma vie sociale sera entièrement détruite.
Cette capacité mise au seul profit de la mascarade de ma propre impuissance de contrôler ces jambes en constant mouvement, cette incapacité a discuter sans couper la parole, ce combat du quotidien voué a l’oeuvre mort-née.
La frustration de pouvoir tout imaginer et de ne pas avoir la force de s’imposer la réalisation.

Des années à subir l’étonnement des uns, la jalousie de la facilité, les moqueries, et jusqu’où les mots vont ?
« tu t’auto détruis »
« tu n’arrive à rien »
« pourquoi tu n’utilises pas tes capacités »
« tu n’es que mon fils biologique »

Oh, bien sur, j’ai appris à faire la part des choses, certains maux ne sont que les effets d’une même cause.

J’ai pleuré ne me rendant compte que d’autres vivaient ma vie.

Et pourtant, je me suis cru aliéné, malade, désaxé. Mais pas, je ne suis pas anormal.

Oui quand tu me parles, je sens tes émotions, je suis réceptif aux changements de tes intonations, au langage de ton corps.
Oui je ne sais pas finir, je ne sais pas me concentrer.
Mais j’aimerais.

Je vis conscient de cela depuis une vingtaine d’année. Plus précisément depuis le collège, où le degré d’attention requis augmente. Et forcement, j’ai plus suivi.
Du premier de la classe, je suis devenu un élevé moyen, puis au fur et à mesure, un des cancres. Paniqué, j’ai cherché des moyens de faire oublié.
J’ai volé, j’ai menti, j’ai triché.
J’ai changé 150 fois de centre d’intérêt.

Péniblement, j’ai obtenu mon bac. Cela fait maintenant 8 ans, pardon 9 ans, j’ai perdu mon année d’avance, que je n’ai jamais pu apprendre une leçon ‘par coeur’. Je lis des livres, oh oui, mais j’y lis des dizaines de pages en diagonale.

Je fume. Je savais que je ne devais pas commencer : je ne peux pas lutter contre mes addictions.Tant pis : je les agrémente. Ca m’aide.
Pendant 2 heures, mon esprit s’ouvre, ma conscience est apaisée.

Pourtant, je continue mes études. C’est encore pire. Non seulement les cours durent 4 heures, autant dire une éternité, mais le rythme est lent, très lent. J’essaye, je bute. Notamment sur le droit… Rire.. .Je le savais à l’avance, trop long, trop théorique, trop de lignes.
Je décroche des cours. Je me réfugie dans le cuites rituelles du vendredi soir.
Je vis à découvert, dans un studio que j’ai rendu insalubre au grands éclats de rire de ma bande de copains que depuis j’ai écoeuré.
J’arrête l’école. Je craque. C’est insoutenable de se sentir toujours plus médiocre.

Je trouve un job. Par hasard. Il est facile. Ca parle de chiffre, de plus value et il suffit de convaincre quelqu’un pour qu’il m’embauche. Pas de tache trop longue, je travaille vire, très vite. Trop vite. Je fais en 2 heures ce que les autres font en 6 heures (quoi que je les soupçonnes de ne pas se voir affecter plus de travail)
J’y rencontre une fille, je tombe amoureux. Mon dieu, c’est la première fois. Toutes les autres sont tombés dans l’oubli au premier baiser.
Je reste, je la veux. Le jeu dure 1 an.

Je fume 25 G d’herbe par semaine, même le matin avant d’aller travailler. Je me sens à la limite, mais c’est ce qu’il me faut pour supporter.

Je vais voir un psychiatre, il me parle de ma mère, mais il fait fausse route. Au bout de quelque temps, il me dit que je n’ai pas besoin de lui, que je n’ai rien, sauf des angoisses, normales à mon âge.

Nous nous marions, je travaille. Serait-ce le début de la normalité ?
Non, faut remplir les impôts, faire des paperasses débiles, gérer un compte, payer les charges, le loyer…Ca m’effraye rien que d’y penser.

Je vais voir un médecin, lui dit au combien il m’est difficile de dormir, que je me sens seul, mal, désabusé.
Il me dit que c’est dans ma tête.

Nous en avons un enfant. Mon fils. De suite après un autre, Ma fille.
Je les aime fort.

Je ‘travaille’ presque, je me vends, je communique, mais souvent, ça reste du vent. Parfois un sujet me passionne et m’absorbe, mais bordel, j’arrive toujours pas à finir.
Ils me disent ‘ingérable’, ‘ne sais pas écouter’, mais ‘brillant’, ‘créatif’ et ‘vendeur’.

Je veux arrêter de rêver. Je veux juste pouvoir finir ce que j’ai commencé.
Je vous demande d’empêcher mes jambes de bouger sans cesse, de pouvoir finir ce que j’ai commencé.

Hier j’ai été diagnostiqué TDA/H, une nouvelle vie commence peut-être ?

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